Contre temeraires.

Phaëton fier pour son lignage,[1]
Le Soleil conduire voulut:
Les chevaux trop forts pour son aage,
L’ont puni de ce qu’il eslut.
Maint homme est, que mieux luy valut,
Qu’en jeune aage eust moins eu richesse:
Car apres estat dissolut,
Il chet sous le mal qui le presse.

commentaires.

Phaëton, fils d’Appollon & de la nymphe Clyme-
ne, fut temeraire & importun à l’endroit de son
pere, que sondit pere fut contraint de luy accorder
pour un jour le maniment des chevaux qui portent le
  Link to an image of this page  [F7r p93] Soleil. Fardeau toutesfois trop pesant pour ses espau-
les: Car ces chevaux, recongnoissans l’insuffisance de
leur nouveau gouverneur, se donnerent carriere où ils
voulurent, n’estant pas en la puissance de Phaëton
de les empescher: & de la s’ensuyvit un grand
embrasement en terre, qui fit que Jupiter, craingnant
que le ciel n’en patist, fut contraint de foudroyer sur
Phaëton, & le precipiter en bas. Ovide recite par le me-
nu ceste fable au second livre de la metamorphose. Il
ne s’est trouvé & ne se trouve que trop de Princes, qui
sont de l’humeur de Phaëton. Ils veulent commander
sans avoir obeï, & qui pis est, se desdaignent de pren-
dre l’advis & conseil de leurs anciens gouverneurs
& conseillers, qui se sont aidés à conduire le timon de
l’estat sous les Princes precedents. De ceste presom-
ption & temerité bien souvent s’engendrent des
guerres mal fondees, ou, qui pis est, des combustions
& embrasements de ligues intestines, qui renversent,
voire accablent du tout, & l’estat, & le Prince qui
y commande.