
MES DE MAISTRE AN-
dre Alciat, puis nagueres augmentez
par ledict Alciat, & mis in [=en] rime
francoise, avec curieuse
correction.
Chrestien Wechel, demeurant en la rue
sainct Jacques, a lescu de Basle: & en
la rue Sainct Jehan de Beauvais, au
cheval volant. L’an M. D. XLII.


SANT SEIGNEUR,
Monseigneur messire Philippe Chabot,
chevalier de lordre, Conte de Burancoys
et Charny, Baron d’Aspremont, de Paigny
& de Myrebeau, seigneur de Bryon, de
Beaumont, & de Fonteine Francoyse. Ad-
myral de France, Bretaigne, & Guyennne.
Gouverneur & Lieutenant general pour
le Roy en Bourgongne, aussi lieutenant ge-
neral pour monseigneur le Daulphin, ou
gouvernement de Normandie, Jehan le Fevre
secretaire de monseigneur reverendissime
Cardinal de Givry, Dit humble salut.
SIl est ainsi,
hault & puissant
seigneur, que aucunesfois l’on
travaille a faire jeux publi-
ques, pour esjoyr & consola-
tier les habitans d’ ville, sans qu’on sai-
che a qui l’on sesforce complaire. C’est chose
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bien juste, que lá ou nous cognoissons le chef
de nostre province aggravé de soucyz pour
le pays, travaillé de labeurs continuelz
pour le bien du peuple: et par ce souvent se-
paré de sa santé
ordinaire: nous mettions
noz effors en ouvraige, pour
dresser cho
se qui luy complaise, partie par comedies li
gieres, partie par
matieres graves & sen
tences dignes de celuy, a qui la
recreation
est aprestee: affin que
les joyeux propos
coustumiers de
effacer tristesse, puissent
maintenir sa virilité, suyvant le
dire de
Sa
lomon, et les graves sentences se
saichent
accommoder a sa severe
prudence tresuti-
le a tous ceulx de son
gouvernement. A ce-
ste
cause, mon treshonoré
seigneur, pour
aucunement restituer ce que je vous doibs
en service, et
satisfaire au relief de vostre
recreation (que le grand
poix des affai-
res du royaulme tient en surseance) jay
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ausé employer quelques jours a
reduire
en Francoys ung petit
livret, lequel je nom-
me selon son premier tiltre,
les Emblemes,
ou les Marqueteures de
maistre
Andre
Alciat, homme qui tient pleine jurisdiction
ez sciences, et qui n’est pas moins
luysant
par la doctrine legale que par les sciences
humaines, selon que assez le vous a insinué
son renom, et
la relation tant de ceulx que
son erudition a dressez, que aultres gens
de riche estude, dont vostre maison et fa
mille est
decoree. Il peult advenir que mon
occupation se treuvera menue a la
compa
raison de ce que vous appartient: mais j’ay
ainsi choisy pour
ceste fois, au moyen de
ce que plusieurs gentilz hommes de la court,
se delectent non seullement a faire
paindre,
ains a faire
effigier de orfavrerie
diver-
sitez de ymages, quilz nomment
devises, y
adjoustans quelques sentences propres et con-
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sonantes. A quoy me semble ce present li-
vret estre
tresconforme, & dont ma
har-
diesse a cueilly occasion de le faire
compar
oir pardevant vous. Toutesfois si ce
pe-
tit besoigne se treuve
debilement pourveu
d’auctorite pour assister soubz vostre le-
cture, il pourra parvenir devant ma Da
me vostre
treschiere amye & espouse:
la
quelle (ainsi que promet mon espoir) con-
vertira sa bonne
grace devers quelque feuil-
let de ce livre.
Car il ne’est [=n’est]
au jour dhuy
chose
tant desdaignee entre les
hommes,
qui n’ayt sa portion d’aornement ou de utili
té:
ce que nature a providemment voulu, affin
que les choses de petite
extime ne perdis-
sent leur estre, ou fussent effacees de la
souvenance des hommes. Je pense bien qu’il
sera veu par plusieurs personnaiges qui
obtiennent
meilleure place que moy en tou-
te
facon descripre, et qui plus heureusement
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eussent mis la main a mon entreprise,
com
me mieulx appelez, et de plus long temps
a dresser propos de
francoyse eloquence.
Parquoy je me declaire
prest a souffrir
leur lime, & patiemment recepvoir leur
cor
rection: soubz laquelle je confesse
ja, que je
n’ay
pas tousjours gardé
lintegrite de
cha
scun polistique ou
epigramme, en rendant pa
rolle pour parolle: ains me
suys contente,
suyvant la doctrine de
Horace, de exhiber
l’argument d’iceulx: & ce ainsi prochaine
ment, que les
vers déune langue veullent
souffrir estre
transportez a
vers d’aultre lan
gage. Ce que
n’ay peu faire
icy precisement,
pource que
j’ay travaille
de tousjours ob
server le nombre de
huict vers: et il est no
toire que le
distique de la fertile langue la
tine surpasse trois vers
francois du com-
mun
gendre: laquelle exuberance m’a
rap
porte obligation prohibitive de
plus fort
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approcher le texte. Qui est cause que soubz
le privilege des licences
poetiques, j’ay usé
dobtruncation et habundance, selon le be
soing. Ce que presentement je metz
entre
voz munifiques mains, avec l’offre de mes
humbles services.
Affin que vous puissez
asseoir vostre sain jugement sur les
gran
des differences,
estans entre celluy
qui hum-
blement desire scavoir, et celluy qui
scait
dont l’on
emprunte les matieres de constru
stion [=construction]
.
Et si l’oeuvre vous est aggreable, ce
me sera ung esperon pour faire plus grand
effort a vous complaire, selon que je
doibs,
et que j’en ay
bonne affection, comme scait
nostre seigneur. Auquel je fais
prieres
vous donner
prospere et longue
sante au
magnifique
estat ou il vous a
constitue.

Ce livre pour ung peu de vent,
Sen voulut ung
jour envoler:
Je luy mys la main au
devant,
En disant, ou veulx tu aller,
C’est folye
te mettre a l’air,
Quant encor tu n’as de ame adveu:
Assez m’est (respond son parler)
Si dire puys,
monsieur m’a veu.

D. ANDREAE ALCIATI
in libellum Emblematum Praefa-
tio, ad D. Chonradum
Peutingerum Au-
gustanum.
Dum pueros iuglans, iuvenes dum tessera fallit,
Detinet & segnes chartula picta viros.
Haec nos festivis Emblemata cudimus horis,
Artificum illustri signaque facta manu.
Vestibus ut torulos, petasis ut figere parmas,
Et valeat tacitis scribere quisque notis.
At tibi supremus preciosa nomismata
Caesar,
Et veterum eximias donet habere manus.
Ipse dabo vati chartacea munera vates,
Quae Chonrade mei pignus amoris habe.

luysant homme Andre Alciat, faicte a mai-
stre Conrad Peutingre de Auspurg.
PEndant que enfans
au jeu de noix se amusent,
Et les plusgrands souvent aux dez se
abusent,
Pendant que aulcuns aux cartes perdent
temps,
Jay cy
dressé (selon que je entends)
Quelques propos composez par
histoires,
En quoy je rends voyes a tous notoires,
Comme ilz pourront par seulz signes bien dire,
Et maintz bons motz, sans letre faire,
escripre:
Qu’on peult
poser en signeaulx et d’oreures [=doreures]
De escuz, bonnetz, et en aultres
pareures:
Pour maintenant cy tel
present rendons.
Laissans aux Roys les groz presens
et dons,
Donques Conrad, prends de
m’amour ce gaige.
Ung poete
a tous ses dons en langage.
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